Ombre et lumière sont représentées par les couleurs noires (yin) et blanches (yang) dans le symbole qui les unit (tai chi).
Ombre et lumière : l’union du noir et du blanc
Le tai chi résulte de l’union incessante des souffles yin et yang. Ceux-ci s’opposent et se complètent aussi bien dans le corps humain que dans le reste de l’univers. Dans ces deux catégories rattachées symboliquement à l’ombre et à la lumière, yin représente un mouvement d’assombrissement et yang un mouvement d’éclairement.
Vu sous cet angle le tai chi chuan devient un jeu permettant d’appréhender les rapports cycliques et complexes entre ces deux entités fondamentales. C’est, en outre, un combat contre la part d’ombre que nous portons en nous-mêmes. Cette part ne doit pas être détruite. Elle doit, au contraire, être intégrée car la lumière est inséparable des ténèbres.
Dans de nombreuses traditions, le symbolisme de la sortie des ténèbres représente l’un des principaux constituants des rites initiatiques. L’adepte du tai chi chuan prend conscience progressivement de son monde intérieur et du monde environnant. En devenant un peu plus lucide, il abandonne nombre d’illusions.
Renouer avec les grands récits
Le tai chi chuan propose d’accomplir l’enseignement du Daode jing (chap.28) « Connais le blanc, adhère au noir, sois la norme du monde. Quiconque est la norme du monde, la vertu constante ne s’altère pas en lui. Il retrouve l’illimité ». Chaque geste de tai chi chuan invite à doser le yin et le yang, à comprendre le fonctionnement des choses. Chaque forme nous rappelle, en outre, que le grand ultime (tai chi) trouve son origine et sa finalité dans le wuji (le sans limite).
Le solstice d’hiver ouvre la phase ascendante du cycle annuel. Il introduit sa phase lumineuse. Les anciens taoïstes pratiquaient des rituels particuliers à cette époque de l’année. Les Romains fêtaient le Sol Invictus (le Soleil invaincu). Dans de nombreuses traditions, le dieu principal (Dionysos, Mithra, Jésus) naît à cette époque. Il signifie ainsi la renaissance de la lumière à l’heure la plus sombre. L’arbre de Noël – toujours vert – rappelle la continuité de la vie à travers la stérilité de l’hiver.
Le yang dans le yin, symbolisé par le point blanc dans la partie noire, acquiert ainsi toute son importance. L’adepte l’appelle « yang véritable ». À un certain niveau, la nuit ne représente plus l’absence ou la privation de lumière mais, au contraire, son état principiel.
Compris et transmis de cette façon, le tai chi chuan constitue une remarquable méthode pour retrouver ses racines. Cet art de vie permet également de conserver la mémoire. Il redonne du sens dans un monde trop souvent ressenti comme désenchanté.
Édito revu Espace Taiji n° 66
Crédit photo : Almereca